Je me laisse guider par la peinture tout en la guidant. Ma pratique part d’abord d’une envie de se confronter aux matériaux, d’un plaisir de marier les couleurs, les textures et les formes. D’être surpris par ce qui se révèle sous le pinceau. Car des formes y naissent qui ont l’évidence du hasard.
Mais mon besoin de raconter l’humain fait vite surface et se manifeste dans des corps figurés comme pris sur le vif. Le corps et sa trace, même dans le rêve et même dans l’humour, dans la légèreté, dans l’anecdote. Alors je les mets en scène, j’élabore des paysages, construis des mondes et cela peut donner une histoire, en tout cas un moment d’existence. Et là j’insère mes propres souvenirs, mes propres moments forts. J’y mets des gens que je connais, parfois même ils posent. Ou bien je reprends des souvenirs, ou des objets qui m’ont intrigué, fasciné ou amusé. Mais je ne perds pas de vue que je construis un monde et aussi je veux y mettre de l’ailleurs. Alors j’y mets du fantastique comme pour rêver, j’y mets des temps perdus ou racontés par l’Histoire ou par un vieux fou croisé un jour.
Et alors la peinture reprend ses droits, et un maelstrom emporte tout. Et là peut-être qu’il faut tout recommencer ou bien peut-être qu’une poésie englobe l’ensemble et c’est bien.
J’ai une pratique intuitive de la peinture nourrie par un amour de la rencontre d’œuvres de tous temps et de tous lieux. On peut y retrouver l’instinct de la Bad Painting, ou une déstructuration à la Francis Bacon, ou l’onirisme d’un Guillaume Pinard. On peut faire des liens avec les productions de Nicole Eisenman ou Philip Guston. Mon travail est l’expression d’une histoire en devenir.